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12.08.2017

Le vin aurait ses racines dans le Caucase

Des fouilles en République de Géorgie ont mis au jour des traces de la plus ancienne vinification au monde.

Cela s'est fait dans le cadre de l'expédition du projet Archéologique Régional Gadachrili Gora (GRAPE), menée conjointement entre l'Université de Toronto et le Musée National Géorgien.

Le vin aurait ses racines dans le Caucase
Une photo prise par un drone sur le site de fouilles de Gadachrili Gora site (photo de Stephen Batiuk)

La découverte permet de dater l'origine de la pratique à la période néolithique, aux environs de 6000 avant JC, la repoussant de 600 à 1000 ans avant l'ancienne date acceptée. Auparavant, les plus anciennes traces chimiques de vin remontaient à 5400-5000 avant JC dans la région des Monts Zagros en Iran.


D'après ces nouvelles fouilles, la pratique de la vinification aurait commencé des centaines d'années plus tôt dans le sud de la région du Caucase, à la frontière de l'Europe de l'Est et de l'Asie occidentale.


Les fouilles se sont concentrées sur deux sites du néolithique ancien (6000-4500 avant JC) nommés Gadachrili Gora et Shulaveris Gora, à environ 50 kilomètres au sud de la capitale moderne Tbilisi.

Des fragments de poterie trouvés sur les sites ont été recueillis puis analysés par les scientifiques à l'Université de Pennsylvanie afin de vérifier la nature du résidu conservé à l'intérieur pendant des millénaires.

Les nouvelles méthodes d'extraction chimique ont confirmé qu'il y avait de l'acide tartrique, un composé du raisin et du vin ainsi que trois acides organiques associés (malique, succinique et citrique), dans les résidus provenant de huit grandes jarres.

"Nous pensons que c'est le plus ancien exemple de domestication d'une vigne eurasienne sauvage uniquement destinée à la production de vin" rapporte Stephen Batiuk, associé de recherche au Département des Civilisations du Proche et Moyen Orient et au Centre d'Archéologie de l'Université de Toronto, et co-auteur de l'étude, "la version domestiquée du fruit a plus de 10.000 variétés de raisins de table et de vin dans le monde entier. Et la Géorgie abrite plus de 500 variétés uniquement pour le vin, ce qui suggère que les raisins ont été domestiquées et croisés dans la région pendant une très longue période de temps".

GRAPE représente la composante canadienne d'un projet international interdisciplinaire beaucoup plus grand, impliquant des chercheurs des Etats-Unis, du Danemark, de France, d'Italie et d'Israël.

Le vin aurait ses racines dans le Caucase
La base d'une jarre néolithique préparée pour échantillonnage pour l'analyse des résidus (photo de Judyta Olszewski)

Les sites, fouillés par l'équipe de l'Université de Toronto et du Musée National de Géorgie, sont les restes de deux villages remontant à la période néolithique, qui a débuté aux alentours de 15,200 avant JC dans certaines parties du Moyen Orient et qui s'est terminé vers 4500 à 2000 avant JC dans d'autres parties du monde.

La période néolithique est caractérisée par un ensemble d'activités comprenant le début de l'agriculture, la domestication des animaux, le développement de l'artisanat comme la poterie et le tissage, et la fabrication d'outils en pierre polie.

"La poterie, qui était idéale pour le traitement, le service et le stockage des boissons fermentées, a été inventée au cours de cette période accompagnée de nombreux progrès dans l'art, la technologie et la cuisine," explique Batiuk, "la méthodologie pour identifier les résidus de vin dans la poterie a été développée et testée à l'origine sur des récipients du site de Godin Tepe dans le centre-ouest de l'Iran. Le site a été fouillé il y a plus de quarante ans par une équipe du Musée Royal de l'Ontario dirigée par le chercheur de l'Université de Toronto, Cuyler Young. Donc, à bien des égards, cette découverte amène mon co-directeur Andrew Graham et moi-même à revenir sur le travail de notre professeur Cuyler, qui a également fourni certaines des théories fondamentales sur les origines de l'agriculture au Proche-Orient. En résumé, ce que nous étudions est la façon dont les activités du néolithique, comme l'activité agricole, la fabrication d'outils et l'artisanat qui s'est développé plus au sud, en Irak, Syrie et Turquie, ont été introduites dans différentes régions avec différents climats et vie végétale".

Pour les chercheurs, les données archéologiques, chimiques, botaniques, climatiques et radiocarbones fournies par les analyses démontrent que la vigne eurasienne, Vitis vinifera, était abondante autour des sites étudiés. Elle poussait dans des conditions environnementales idéales, au début de la période néolithique, similaires aux régions viticoles en Italie et dans le sud de la France aujourd'hui.

"Notre recherche suggère que l'une des principales adaptations du mode de vie néolithique dans le Caucase était la viticulture," ajoute Batiuk, "la domestication du raisin a conduit finalement à l'émergence d'une culture viticole dans la région."

Il décrit une ancienne société dans laquelle la boisson et l'offrande du vin pénètrent et imprègnent presque tous les aspects de la vie, de la pratique médicale aux célébrations spéciales, de la naissance à la mort, aux repas quotidiens où la cuisson est courante: "En tant que médicament, lubrifiant social, substance psychotrope et produit de grande valeur, le vin est devenu le centre des cultes religieux, des pharmacopées, des cuisines, de l'économie et de la société à travers le Proche-Orient ancien."

Batiuk cite la viticulture ancienne comme un excellent exemple de l'ingéniosité humaine dans le développement de l'horticulture, et des utilisations créatives pour ses sous-produits: "La gamme infinie de saveurs et d'arômes des 8 000 à 10 000 cépages d'aujourd'hui est le résultat final de la transplantation de la vigne eurasienne domestiquée et de son croisement incessant avec des vignes sauvages" ajoute-t-il, "la vigne eurasienne, qui représente aujourd'hui 99,9% du vin produit dans le monde, a ses racines dans le Caucase".

Merci à Audric pour l'info !

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6.05.2017

D'anciennes graines d'orge donnent un aperçu de l'histoire des îles Canaries


Si vous êtes déjà allés aux îles Canaries et que vous avez mangé du gofio (un aliment à base de céréales grillées), alors vous avez consommé la même nourriture que celle des habitants il y a 2000 ans. En effet, les agriculteurs de l'île cultivent les mêmes types de céréales depuis des milliers d'années.

Telle est la conclusion rapportée par des chercheurs de l'Université de Linköping en Suède et de l'Universidad de Las Palmas de Gran Canaria en Espagne, après l'analyse ADN de graines préhistoriques.

D'anciennes graines d'orge donnent un aperçu de l'histoire des îles Canaries
Des chercheurs ont mené des analyses génétiques de l'ADN provenant de graines d'orge préhistoriques trouvées sur les Îles Canaries: Photo: Jacob Morales


"L'étude du matériel génétique de l'orge des îles Canaries peut améliorer notre compréhension de l'histoire de l'île. Nos analyses supportent la théorie selon laquelle les Îles Canaries ont été colonisées par des tribus du nord du Maroc. Et même si les archéologues n'ont jamais trouvé d'orge à Lanzarote, nous sommes relativement sûrs qu'elle y était cultivée pendant la période préhistorique, exactement comme le décrivent  d'anciennes sources espagnoles" rapporte Jenny Hagenblad, professeur agrégé à l'Université de Linköping et l'un des membres de l'équipe qui a travaillé sur l'étude.

Les Îles Canaries ont une tradition de culture céréalière qui remonte bien avant la conquête espagnole au 15ème siècle. A l'époque préhistorique, l'orge était l'une des principales céréales de l'île de Grande Canarie. Les céréales étaient stockées dans des grottes que les populations indigènes avaient creusées dans le substrat rocheux à base de lave. Ces grottes abritaient leurs précieuses récoltes. "Les conditions dans ces grottes étaient idéales pour le stockage, et il est possible aujourd'hui, plus de 500 ans après, de trouver des graines intactes dans certaines des grottes les plus reculées et les mieux cachées" précise Jacob Morales de l'Université de Las Palmas de Gran Canaria.



Jenny Hagenblad et ses co-équipiers ont étudié certaines de ces graines, et ont constaté qu'elles avaient presque 1000 ans. 


Cependant, elles sont si bien préservées qu'il est possible d'effectuer une analyse génétique de leur ADN.

Les chercheurs ont analysé 100 différentes variantes génétiques, afin d'obtenir non seulement des informations concernant l'orge, mais aussi pour voir à quel point l'orge préhistorique ressemble à celle cultivée de nos jours sur l'île.

L'orge préhistorique a été comparée avec plus de 100 variétés cultivées de nos jours sur l'île, en Afrique du Nord et dans la région méditerranéenne. "Depuis que la population originale a été remplacée dans une large mesure par la population espagnole, nous étions intéressés de voir si l'orge avait aussi été remplacée. Nous avons découvert, cependant, que ce qui est cultivé sur les îles Canaries de nos jours est exactement la même orge que ce que les populations originales avaient amené sur l'île lorsqu'elle fut colonisée au début du premier millénaire après JC." précise Jenny Hagenblad,

"Nous en avons aussi appris beaucoup sur l'orge qui était cultivée à l'époque préhistorique. Les marqueurs génétiques que nous avons utilisés montrent que l'orge avait un contenu nutritionnel élevé, et que chaque plante produisait de nombreuses graines. L'orge semble s'être bien adaptée aux conditions des Îles Canaries, et c'est quelque chose que les conquérants espagnols ont probablement remarqué" ajoute Matti Leino, professeur agrégé au Nordic Museum.

Les résultats de l'étude ont été publiés dans le Journal of Archaeological Science: "Farmer fidelity in the Canary Islands revealed by ancient DNA from prehistoric seeds"

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Relecture par Digitarium.fr
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2.09.2017

Une tombe vieille de 2 500 ans révèle un usage ancien du cannabis

D'après une nouvelle étude, il y a environ 2500 ans, des proches ont enterrés un homme dans une tombe élaborée, et l'ont recouvert d'un linceul fait de 13 plantes de cannabis.

Une tombe vieille de 2 500 ans révèle une ancienne utilisation du cannabis
La tombe Jiayi M231, contenait un squelette avec des objets funéraires et des plantes de cannabis posées sur le corps. Credit: Hongen Jiang et al. Economic Botany. 2016.

La tombe dans laquelle les archéologues ont découvert du cannabis.est l'une des quelques sépultures anciennes découvertes en Eurasie centrale.

Située dans le nord-ouest de la Chine, elle apporte un nouvel éclairage sur la façon dont les hommes préhistoriques de la région utilisaient les plantes lors des rituels. C'est "une remarquable découverte archéobotanique à part entière" qui survient après que les habitants de la région moderne aient décidé de construire un nouveau cimetière à côté d'une oasis pittoresque, précisent les chercheurs. C'est ainsi que des ouvriers ont découvert cet ancien cimetière.

Les archéologues sont arrivés sur le site et ont rapidement découvert une abondance d'artéfacts enfouis dans les tombes: des arcs, des flèches et les restes d'animaux domestiques, dont des chèvres, des moutons et un crâne de cheval; tout cela indique que ces anciens habitants vivaient à la fois de la chasse et de l'élevage.

Localisation de l'ancien cimetière Jiayi. Credit: Hongen Jiang et al. Economic Botany. 2016.

Un cimetière Subeixi


L'ancien cimetière de Jiayi appartenait probablement à la culture Subeixi, d'après les analyses d'anciens pots en terre cuite trouvés dans certaines des tombes. Les Subeixi ont été les premiers hommes connus à avoir vécu dans le bassin aride de Tourpan, il y a environ 3000 ans.

En tout, les archéologues ont découvert 240 anciennes tombes, dont celle de l'homme avec le linceul de cannabis (tombe M231). Les restes du défunt, un caucasien d'environ 35 ans, reposaient sur un cadre de lit en lattes de bois. Sa tête reposait sur un oreiller fait de roseaux communs et la tombe était remplie de pots en terre cuite.

Mais, plus étonnant, "13 plantes de cannabis presque entières étaient disposées en diagonale sur le corps du défunt comme un linceul, avec les racines et les parties basses des plantes rassemblées et placées sous le pelvis" ont écrit les chercheurs.

La tombe Jiayi, M231 (a). Vue rapprochée du cannabis dans la tombe (b). Un dessin montrant le contenu de la tombe, dont des pots de terre cuite intacts (1 à 4); des pots brisés (5 à 7), les plantes de cannabis (8); des fragments d'oreiller (9); et des herbes sauvages (10) (c). La couche inférieure de la tombe avait un cadre de lit en bois et un oreiller en roseau (d). Credit: Hongen Jiang et al. Economic Botany. 2016.

Les plantes étaient longues d'environ 49 à 90cm et arrivaient juste en-dessous du menton de l'homme sur la gauche de son visage. Des fruits non matures sur les plantes de cannabis suggèrent qu'elles ont été déracinées à la fin de l'été, ce qui indique que le défunt a été enterré en fin août ou début septembre.

Bien que la tombe date entre 2400 et 2800 ans, d'après les analyses au radiocarbone, le cannabis est resté intact en raison de la sècheresse de la région. Il peut s'écouler des années avant qu'il ne pleuve.

Les dépôts fluviaux, comme le sable et les cailloux, ainsi que les restes anciens de plantes aquatiques, dont des prêles et roseaux, indiquent que l'ancien cimetière de Jiayi se trouvait près d'une rivière.


La tombe M231 est la seule ancienne sépulture contenant du cannabis. 


Il existe un autre cimetière Subeixi dans le bassin de Tourpan, appelé cimetière Yangha; il remonte aussi au premier millénaire avant JC selon une étude datant de 2006. L'une de ses sépultures avait une grande quantité de fleurs de cannabis traitées dans deux récipients: un panier en cuir enroulé et un bol en bois. Ils reposaient près du corps d'un homme.

La tombe ne contenait aucune trace de vêtements de chanvre ou de corde, qui était faits en plantes de cannabis. Au contraire, les grosses graines de la plante et la forte présence de cannabinol (un produit dégradé du tétrahydrocannabinol psychoactif de la plante, ou THC) suggèrent que le cannabis était utilisé comme substance psychoactive.

Une autre ancien tombe du cimetière de Yanghai contenait des têtes de fleur de cannabis, indiquant que les habitants devaient les utiliser à fin médicinale.

Les archéologues ont aussi trouvé du cannabis dans des tombes de la culture Pazyryk dans le sud de la Sibérie, où il y a aussi des traces de plantes à "usage rituel si ce n'est psychoactif"

Les spécialistes ont aussi découvert la plante dans la tombe tombe d'une femme de la culture Pazyryk dans l'Altaï; elle était morte d'un cancer du sein et utilisait probablement le cannabis pour faire face aux symptômes.

D'après les chercheurs, il semble que "l'usage du cannabis à titre médicinal, et probablement spirituel, ou du moins rituel, était une coutume répandue parmi les habitants de l'Eurasie Centrale au cours du premier millénaire avant l'ère chrétienne".

Source:
Live Science: "2,500-Year-Old Burial Hints at Ancient Cannabis Use"

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