3.20.2017

Une exceptionnelle découverte d'art rupestre vieux de 14000 ans en Bretagne

Vous avez été plusieurs à me signaler cette découverte exceptionnelle d'art rupestre faite près de Plougastel-Daoulas en Bretagne et qui a fait l'objet d'un article dans la revue scientifique Plos One: "Divergence in the evolution of Paleolithic symbolic and technological systems: The shining bull and engraved tablets of Rocher de l'Impératrice")

En 1987, suite à une tempête, des vestiges archéologiques sont découverts au Rocher de l'Impératrice. Les fouilles vont révéler un abri-sous-roche, puis, en 2013, une équipe d'archéologues exhume des silex travaillés en pointes de flèches, des couteaux et des outils. Ils trouveront aussi des plaquettes de schiste de 15 à 30cm de long portant des gravures de chevaux et d'aurochs. Le tout datant de 14000 ans !

Une exceptionnelle découverte d'art rupestre vieux de 14000 ans en Bretagne
Fragment 317 avec une décoration bifaciale: côté A) tête d'auroch entouré de lignes rayonnantes; côté B) Tête d'auroch (photos N. Naudinot; sketch C. Bourdier).

Le développement de l'Azilien en Europe de l'Ouest il y a 14000 ans est considéré comme une "révolution" en archéologie du paléolithique supérieur. L'un des éléments de cette rapide restructuration sociale est l'abandon de l'art figuratif naturaliste sur des pièces portables ou les murs des grottes au cours du Magdalénien en faveur du expression abstraite sur de petits cailloux.

De récents travaux montrent que la transformation des sociétés humaines entre le Magdalénien et l'Azilien a été plus graduel. La découverte de ce nouveau site de l'Azilien ancien avec des pierres décorées accrédite cette hypothèse.

Alors que de grands changement dans la technologie de la pierre taillée, entre le Magdalénien et l'Azilien, marquent clairement d'importants changement adaptatifs, la découverte des 45 tablettes de schiste gravées, provenant de couches archéologiques du Rocher de l’Impératrice, atteste de la continuité iconographique avec une valorisation particulière des aurochs, comme le montre celle représentant un auroch "rayonnant".

Cet élément suggère que certaines caractéristiques culturelles, comme l'iconographie, ont pu survenir bien après les changements technologiques.

Les auteurs soutiennent également que le changement éventuel de l'expression symbolique, qui comprend la disparition ultérieure de l'art figuratif, donne une nouvelle idée de la restructuration probable des sociétés.
Une exceptionnelle découverte d'art rupestre vieux de 14000 ans en Bretagne
Tablet 741 avec une décoration bifaciale: côtée A) cheval complet; côté B) composition spéciale avec deux chevaux en symétrie axiale, l'un complet et l'autre que la tête; il y a aussi un cheval tout petit entre les pattes d'un grand (photos N. Naudinot; sketch C. Bourdier).

Les fouilles sur le terrain


Le Rocher de l’Impératrice est fouillé depuis 2013, tous les étés, et les investigations sont toujours en cours. C'est un petit abri-sous-roche d'environ 10m de long, 3m de profondeur et 2m de haut situé près de Plougastel-Daoulas à l'extrémité ouest de la Bretagne.

En raison de la position du site au pied d'une falaise de quartzite au milieu d'une forêt, aucun équipement mécanique n'est utilisé pour l'excavation du site.

Jusqu'à présent ce sont 45 morceaux de pierres décorées qui ont été trouvés sur le site. A une exception près, ils semblent tous être de petits fragments minces provenant d'anciennes plaques plus grandes. 43 morceaux font moins de 10cm, 29 moins de 5cm.

Compte tenu de l'état de fragmentation, les ébauches sélectionnées semblent provenir de grandes pierres, comme le montre la seule pièce complète de près de 30 cm de long

Une grande tablette représente quatre des cinq chevaux reportés. Trois sujets sont regroupés d'un côté: deux sont visibles en miroir dans une composition inhabituelle. Ils remplissent l'espace et semblent utiliser les bords comme lignes de fond. Ils sont représentés en pleine longueur comme l'animal isolé de l'autre côté. Entre les jambes d'un des grands chevaux apparait la tête d'un quatrième cheval. Cette position et la dissemblance de taille donnent l'impression d'un jeune poulain entre les jambes d'un adulte, son aspect juvénile est renforcé par son design simplifié. Les trois autres animaux présentent un rendu très semblable caractérisé par une forte tendance naturaliste. Les corps sont complets, bien proportionnés et bien faits.


L' «auroch rayonnant»: une valorisation symbolique particulière des aurochs ?


Même s'ils sont dépassés en nombre par les gravures de chevaux dans l'assemblage, la représentation des aurochs semble avoir un accent particulier. Deux aurochs restreints aux têtes sont en opposition sur les côtés opposés du fragment 317. Les gravures sont larges et profondes avec la recherche d'un effet de champlevé. Un côté porte une composition spéciale avec la tête d'un taureau dont le profil gauche est entouré par des rayons profonds créant un effet visuel en surbrillance. Aucun «animal rayonnant» équivalent n'a été trouvé dans l'iconographie paléolithique européenne à ce jour.
L'étude technologique de cette pièce montre une organisation intentionnelle des gestes afin de souligner la place centrale des aurochs.

Une exceptionnelle découverte d'art rupestre vieux de 14000 ans en Bretagne
Sélection de pierres gravées du Rocher de l'Impératrice (photos N. Naudinot; sketch C. Bourdier).

Un modèle très semblable de rayons grands et profonds se retrouve sur un autre petit fragment, suggérant que d'autres figures rayonnantes ont pu être représentées. L' «auroch rayonnant» pourrait ne pas être le seul.

Les 45 fragments de pierre gravée du Rocher de l'Impératrice sont les plus anciens restes graphiques en Bretagne et se révèlent exceptionnels pour l'Azilien Ancien. En France, moins d'une douzaine de sites ont livré des objets décorés liés à ce techno-complexe, la plupart provenant de contextes incertains. Parmi elles, seules trois collections d'art mobile peuvent être clairement attribuées à cette culture: les 82 artefacts lithiques gravés du Murat, les cinq éclats gravés de Le Closeau, un caillou gravé de Bois-Ragot.

Merci à Steven Plet, Patrice Le Monnier et Quentin pour l'info !

Sources et plus d'informations:

3.16.2017

Un statue colossale représentant probablement Ramsès II découverte au Caire

Des archéologues égyptiens et allemands ont découvert une statue haute de huit mètres en quartzite submergée dans les eaux souterraines d'un quartier pauvre du Caire. Elle représenterait le pharaon Ramsès II, qui régna en Egypte il y a plus de 3000 ans.

La découverte, saluée par le Ministère des Antiquités comme l'une des plus importantes à ce jour, a été faite près des ruines du tempe de Ramsès II dans l'ancienne cité d'Héliopolis, située à l'est de la ville moderne du Caire.

Un statue colossale représentant probablement Ramsès II découverte au Caire
Photo:  REUTERS/Mohamed Abd El Ghany

Le dirigeant le plus puissant et célèbre de l'ancienne Egypte, appelé aussi Ramsès le Grand, était le troisième de la 19ème Dynastie d'Egypte et régna de 1279 à 1213 avant l'Ere Commune.

Il a mené plusieurs expéditions militaires et étendu l'empire égyptien jusqu'à la Syrie vers l'est et à la Nubie vers le sud. Ses successeurs l'appelaient le "Grand Ancêtre".

"Nous avons découvert le buste de la statue et la partie inférieure de la tête, et maintenant nous avons enlevé la tête et avons trouvé la couronne, l'oreille droite et un fragment de l'œil droit" précise Khaled al-Anani, Ministre des Antiquités.

L'expédition conjointe egypto-allemande a aussi mise au jour la partie supérieure d'une statue en calcaire de taille humaine du Pharaon Seti II, petit-fils de Ramsès II, longue de 80cm.

Le temple du soleil à Héliopolis fut fondé par Ramsès II, ce qui renforce la probabilité que la statue est de lui. C'était l'un des plus grands temples en Egypte, il faisait presque deux fois la taille de Karnak à Louxor, mais fut détruit à l'époque gréco-romaine. De plus, de nombreux obélisques ont été déplacés vers Alexandrie ou emportés en Europe et les pierres du site furent pillées pour être utilisées dans la construction avec le développement de la ville du Caire.


Les spécialistes vont maintenant essayer d'extraire les pièces restantes des deux statues avant de les restaurer.


S'ils y parviennent et que le colosse s'avère bien représenter Ramsès II, il sera placé à l'entrée du Grand Musée égyptien qui doit ouvrir en 2018.

La découverte a été faite dans le quartier de la classe ouvrière d'el-Matariya, parmi des constructions en cours et des routes boueuses.

Un statue colossale représentant probablement Ramsès II découverte au Caire
Photo:  REUTERS/Mohamed Abd El Ghany

Dietrich Raue, chef de l'expédition de l'équipe allemande, a rapporté que les anciens égyptiens croyaient qu'Héliopolis était l'endroit où vivait le dieu du soleil, ce qui signifie qu'elle était hors des limites pour les résidences royales.

"Le dieu du soleil a créé le monde à Héliopolis, a El-Matariya. C'est ce que j'ai toujours dit au gens lorsqu'ils demandent s'il y a quelque chose d'important par ici. Selon la croyance pharaonique, le monde a été créé à el-Matariya" dit Raue, "Cela signifie que tout devait être construit ici. Statues, temples, obélisques, tout. Cependant, le roi n'a jamais vécu à el-Matariya, car c'était l'endroit où vivait le dieu du soleil."

Cette découverte pourrait être une aubain pour l'industrie du tourisme en Egypte, qui a souffert de nombreux revers depuis le soulèvement qui a renversé l'autocrate Hosni Moubarak en 2011, mais qui reste une source vitale de devises étrangères. Le nombre de touristes visitant l'Egypte est tombé à 9.8 millions en 2011, loin des 14.7 millions en 2010. La chute a continué: au premier trimestre 2016, il n'y avait plus que 1,2 million de touristes contre 2,2 millions un an plus tôt.

Merci à Philippe Boquis pour l'info !

Source:

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3.12.2017

La société Hopewell ou comment la culture peut rendre l'homme moins violent

Les hommes sont-ils violents de façon intrinsèque, ou bien cette violence est-elle le fruit de la culture dans laquelle ils ont grandi ?

La société Hopewell ou comment la culture peut rendre l'homme moins violent
Culture Hopewell: Le Mound City Group à Chillicothe, dans l'Ohio. Source: Wikipédia

Une équipe de biologistes espagnols menée par Jose Maria Gomez, de l'Université de Grenade, ont étudié les racines évolutives de la violence mortelle humaine et publié leurs résultats dans le journal Nature.

Gomez et ses co-auteurs ont examiné les niveaux de violence létale de 1024 espèces de mammifères et parmi plus de 600 populations humaines, d'il y a 50000 ans à nos jours.

L'équipe défini la violence létale comme "la probabilité de mourir suite à la violence de la même espèce comparé à toutes les autres causes". Elle a calculé que la fréquence moyenne de violence mortelle chez les mammifères était de 0.3%. Chez les hommes ont avoisine les 2%...

Les chercheurs ont découvert que les niveaux de violence létale dans les tribus et groupes préhistoriques ne diffèrent pas de manière significative de ce qu'ils ont trouvé parmi les animaux mammifères qui étaient, comme nous, sociaux et territoriaux. Ce serait une preuve que les hommes ont "hérité de leur propension à la violence".

Les chefferies, qui sont des sociétés avec une structure sociale hiérarchique généralement soutenue par une agriculture intensive, étaient, cependant, plus violentes que ce à quoi on s'attendait. Gomez et ses co-auteurs suggèrent que ces hauts niveaux de violence ont été causés par une combinaison de facteurs tels que "les disputes territoriales, la pression des ressources et de la population, et la compétition pour les statuts politiques".

Ce que nous savons des anciennes cultures de l'Ohio, confirme en général les conclusions de Gomez et son équipe.

Robert Mensforth, anthropologue biologiste à l'Université d'Etat de Cleveland, a documenté des preuves de violence létale parmi les bandes et tribus qui vivaient dans l'Ohio et les états environnants, il y a entre 3000 et 5000 ans. Ces preuves comprennent des pointes de flèches fichées dans des squelettes et des traces d'entailles sur les crânes indiquant que la personne avait été scalpée.


Une baisse notable de la violence létale sous la culture Hopewell


Cependant quelque chose d'inattendu s'est passé dans le sud de l'Ohio vers le 1er siècle après JC et ce pendant quelques siècles. Au cours de cette période, la culture Hopewell a créé des extraordinaires édifices en terre et de fabuleuses œuvres d'art; et elle a maintenu un réseau social et religieux qui a couvert la moitié du continent.

Réseau d'échange de la culture Hopewell
Réseau d'échange de la culture Hopewell. source: Wikipédia

Ce qui est remarquable est, qu'au cours de cette période, il y a très peu de traces de violence mortelle.
Les Hopewell ne vivaient pas dans des chefferies,  mais il ne semble pas non plus qu'ils auraient pu réaliser ce qu'ils ont fait si leurs sociétés n'étaient organisées qu'au niveau des bandes et des tribus.

Après la culture Hopewell et l'apparition des chefferies, il y a eu une augmentation marquée de la violence létale, aussi observée dans le monde entier par Gomez et ses collègues.
Les gens se rassemblaient de plus en plus dans de grands villages défendus par des palissades. Nombre d'habitants enterrés dans ces villages avaient des blessures traumatiques, comme des pointes de flèches dans leur squelette.

Pipe en os, culture Hopewell
Pipe en os. Source: Wikipédia

La culture Hopewell nous montre que, bien que nous ayons hérité d'une tendance génétique à la violence létale, notre culture, incluant nos choix collectifs sur la façon dont nous devons nous comporter envers l'autre, nous montre qu'elle peut aussi nous rendre moins violent que nos cousins mammifères. Bien sûr, comme le montrent de nombreux exemples, la culture peut aussi nous rendre plus violent...

La culture Hopewell a ainsi encore beaucoup à nous apprendre...


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3.08.2017

Arroyo Seco: étude d'un campement pré-Clovis en Argentine

Depuis plus d'une décennie, les preuves s'accumulent sur le fait que les hommes ont colonisé les Amériques des milliers d'années avant la Culture Clovis. Les Clovis, qui sont les plus anciens ancêtres des actuels Natifs Américains, ont laissé de nombreuses traces de leur vie sous formes d'outils et de tombes.

Cependant, les mystérieux hommes pré-Clovis, qui sont probablement arrivés il y a entre 17000 et 15000 ans, n'ont laissé que quelques dizaines d'éléments de preuve de leur existence à travers les Amériques, principalement à travers des campements où ils dépeçaient les animaux lors des périodes de chasse.

Arroyo Seco: étude d'un campement pré-Clovis en Argentine
Les hommes vivant en Argentine il y a 14000 ans chassaient des tatous géants. Illustration: Heinrich Harder

Une halte de chasseurs vieille de 14000 ans


Aujourd'hui, un nouvel examen de l'un de ces campements, une halte de chasseurs vieille de 14000 ans à l'extérieur de la ville de Tres Arroyos en Argentine, nous donne une nouvelle compréhension sur la façon dont le peuple pré-Clovis a pu vivre.

Les archéologues ne savent toujours pas précisément comment sont arrivés les hommes pré-Clovis dans les Amériques. Ils sont arrivés après la fin de l'âge de glace mais à une période où les glaciers et un environnement glacial et stérile devaient encore bloquer l'entrée vers les Amériques par le nord du Canada.

Aussi il est très improbable qu'ils aient marché sur un pont terrestre de la Sibérie vers les Amériques jusqu'au milieu du continent. Au contraire, ils ont probablement dû venir d'Asie en suivant une route côtière. Cela expliquerait pourquoi les sites pré-Clovis sont près des côtes, sur des îles, ou près des rivières rencontrant les océans.

Ces anciens colons étaient des chasseurs-cueilleurs utilisant des outils en pierre dans la plupart de leurs activités, comme la chasse, le dépeçage, le grattage des peaux, la préparation de la nourriture, et la fabrication d'autres outils en os et en bois.

De nombreux outils en pierre des pré-Clovis semblent assez simples et ont été faits en utilisant une pierre pour en tailler une autre aux bords coupants.

Arroyo Seco: étude d'un campement pré-Clovis en Argentine
Outils trouvés sur le site d'Arroyo Seco 2 en Argentine: (a) grattoir latéral, quartzite; (b) éclat retravaillé, quartzite; (c) éclat retravaillé, quartzite; (d-e) racloirs faits sur des cailloux arrondis côtiers; (f) pavé bipolaire.

Arroyo Seco 2: un campement saisonnier visité pendant des milliers d'années


Sur le site en Argentine, connu sous le nom de site Arroyo Seco 2, les archéologues ont trouvé plus de 50 de ces outils faits à partir de matériaux comme le chert et le quartzite. Ils étaient dispersés sur une zone qui était autrefois un monticule herbeux au-dessus d'un lac profond. Ils y ont trouvé des milliers de fragments d'ossements d'animaux dont les datations au carbone remontent à 14.000 ans.
Il y a même une douzaine de sépultures humaines sur le site, datant d'une période plus tardive commençant approximativement il y a 9000 ans.

L'endroit a l'aspect caractéristique d'un camp de chasseurs, utilisé pour le traitement des animaux, et  a été revisité de façon saisonnière pendant des milliers d'années.

Dans le journal PLoS One, les chercheurs décrivent un certain nombre de raisons pour lesquelles un tas de pierres à arêtes vives et des ossements brisés d'animaux indiquent qu'il s'agit de l'emplacement d'une occupation humaine vieux de 14.000 ans en Argentine.

Tout d'abord, il y a bien trop d'ossements d'animaux de différentes espèces regroupés sur un même lieu pour que ce soit accidentel. Bien sûr, il existe des pièges naturels où l'on a pu trouver un nombre important d'ossements préhistoriques, mais c'est presque toujours dans des trous ou des dépressions; or, ici, cette zone était sur une colline assez élevée pendant le pléistocène.

Ensuite, les pierres dont les tranchants suggèrent l'écaillement, montrent aussi des signes d'usure par grattage de peau. "Une grande majorité des bords effilés ont été utilisés transversalement sur la peau sèche" écrivent les chercheurs, "en conséquence, il est probable que les peaux ont été amenées sur le site dans un état de traitement intermédiaire".


Le régime alimentaire du pléistocène.


Une question reste cependant: comment peut-on être sûr que les outils trouvés sur le site sont réellement vieux de 14000 ans ?

Les archéologues en ont déduit pour une partie à partir des datations au carbone des ossements d'animaux, qui ont été testés par plusieurs laboratoires dans le monde.

Le problème est que la stratigraphie du site, ou l'histoire des couches, sont difficiles à lire en raison de l'érosion du site. Ainsi, même si un outil apparait juste à côté d'un os dans une couche donnée, il peut très bien provenir d'une couche plus tardive et avoir été déplacé par l'eau et le vent.

Cela dit, il y a des traces indiquant que certains des anciens ossements ont été brisés par des outils en pierre.

Un os vieux de 14000 ans d'Equus neogeus, un cheval américain éteint, porte des marques distinctes d'un marteau en pierre. "Cet os a été intentionnellement brisé alors qu'il était encore frais" notent les chercheurs.
Arroyo Seco: étude d'un campement pré-Clovis en Argentine
Un paresseux géant, dont les os ont été trouvés sur le site Arroyo Seco. Illustration: Robert Horsfall

Avec un lien ferme entre les outils humains et les ossements d'animaux trouvés à Arroyo Seco, nous pouvons commencer à reconstituer ce à quoi devait ressembler la vie de tous les jours pour ces individus, du moins à l'heure des repas.

L'analyse de plus de 600 fragments d'ossements parmi des milliers trouvés sur le site ont révélé qu'une grande quantité de la viande consommée par ces hommes provenait d'animaux qui n'existent plus. Plusieurs espèces éteintes de chevaux constituaient une grande partie de leur régime alimentaire, tout comme d'autres mammifères éteints comme les paresseux géants, les chameaux, les mammouths et les tatous géants.

Lorsque les pré-Clovis sont arrivés en Amérique du Sud, ils ont trouvé des terres qui n'avaient jamais été colonisées par l'homme. Aussi, beaucoup de ces espèces étaient des proies faciles pour des bandes de chasseurs bien organisées, ayant un langage sophistiqué, des outils et des tactiques.

Pour certains paléontologues, l'hypothèse que ces animaux aient disparu en partie à cause des hommes, ainsi que le campement d'Arroyo Seco, prouvent que ces animaux ont fait partie du régime alimentaire des pré-Clovis pendant des millénaires.

Ceci dit, Arroyo Seco contient bien plus d'ossements de guanacos (un camélidé) et de rongeurs que de ces animaux disparus.


Chasser la mégafaune.


L'absence de certains ossements peut aussi nous donner des informations sur le mode de vie de ces gens.

Bien qu'il y ait des os provenant de la mégafaune comme le Mégatherium (paresseux géant), il n'y a pas d'ossements de leur crâne, poitrine ou pelvis. Les chercheurs supposent que c'est parce que les chasseurs auraient fait un premier dépeçage sur le site où ils ont tué l'animal, puis transporté des parties de celui-ci pour les préparer au camp: étant donné la masse corporelle de ces espèces (entre 4 et 5 tonnes), cela aurait été très difficile de transporter la carcasse entière, voire même des quartiers entiers pesant entre 600 et 750kg. Prenant en compte ces valeurs, la meilleure hypothèse est que le Mégatherium était chassé aux alentours du site, puis le squelette était dépecé en plus petites parts, qui étaient ensuite transportées sur le site actuel. Les os plus grands étaient transportés avec des portions de viande déjà enlevées, et ont pu être utilisés à d'autres fins, comme outil pour creuser par exemple.

Concernant les mammifères éteints que les hommes ont dépecés à Arroyo Seco, le plus courant semble être le cheval. Lorsque les hommes sont arrivés dans les Amériques, il y avait au moins deux espèces éteintes de chevaux. Mais à l'époque des Incas et d'autres grandes civilisations d'Amérique du Sud, ces animaux avaient disparu depuis longtemps. Ce n'est qu'avec l'arrivée des européens sur leurs coursiers que le continent a été repeuplé de chevaux.


Au bord d'un lac aujourd'hui presque disparu, sur une butte, ces gens nourrissaient leurs familles, fabriquaient des outils et avaient des stratégies pour chasser des animaux plus grands que tous ceux existants dans notre monde moderne. Ils y sont retournés année après année pendant des siècles.

Finalement, ils ont enterré leurs morts là parmi les ossements d'animaux laissés par leurs ancêtres.

Relecture par Digitarium.fr
Source:

3.02.2017

L'usage du bouclier dans les combats Vikings plus actif qu'on ne le supposait

L'archéologue danois Rolf Warming a cherché à découvrir les techniques de combat que les Vikings devaient probablement utiliser lors des batailles.

Le fameux bouclier Viking a pu être plus utile qu'on ne le pensait (photo: Wolfgang Sauber)

L'étude de Warming a révélé qu'en plus de servir à se défendre contre les attaques, les boucliers avaient également une partie active dans les combats: "Il s'avère que les Vikings semblent avoir utilisé leurs boucliers de manière plus active qu'on ne le pensait" rapporte-t-il. 


Une recherche dans la pratique.


Warming s'est mis en condition de "bataille" en portant l'armure Viking et en utilisant un type de bouclier d'un mètre de diamètre comme ceux découverts lors de fouilles au Danemark, en Norvège et en Suède.

Les dommages constatés sur les boucliers ne concordaient pas avec une utilisation passive attribuée auparavant aux combattants Vikings. Il semble donc qu'ils utilisaient leurs boucliers pour défendre activement les coups d'épée, et s'en sont probablement servis comme arme.

Warming fait remarquer qu'il n'y avait pas qu'une technique utilisée, mais tout un ensemble de techniques agressives au bouclier: il était utilisé pour parer les armes ennemies et peut-être même les frapper.

"Lorsque j'avançais activement avec le bouclier, quel que soit l'angle, il semblait presque être une arme en lui-même, car s'il permet d'éviter les coups, les bords du bouclier peuvent aussi frapper l'ennemi." ajoute Warming.


Il reste encore beaucoup à connaitre


Les minces boucliers ronds étaient courants chez la majorité des Vikings jusqu'à environ l'an 1000, lorsque des boucliers plus lourds, en forme de larme, devinrent de plus en plus populaires.

Warming prévoit de continuer ses recherches sur les méthodes de combat Viking: "J'espère obtenir des fonds pour mener des études similaires dans lesquelles les boucliers sont attaqués avec des haches et des flèches".


Vidéo:


Relecture par Digitarium.fr

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2.26.2017

Le culte de Mithra était présent en Corse

Maj 22/07/17
Un sanctuaire dédié au dieu d'un ancien culte mystérieux, le culte de Mithra ou mithraïsme, a été découvert pour la première fois en Corse.

Ce mithraeum, situé dans la cité romaine de Mariana, fut construit aux alentours de 100 avant l'ère commune.

Le culte de Mithra était présent en Corse
 Vue du mithraeum  et de ses annexes. Photo: Inrap

Les autorités locales planifiaient des travaux routiers à proximité de ce site majeur, c'est pourquoi elles ont fait appel à l'Institut National de Recherches Archéologiques Préventives (INRAP) pour mener des fouilles et vérifier qu'il n'y avait aucun vestige archéologique significatif.

Une équipe menée par l'archéologue Philippe Chapon, a commencé à travailler à Mariana en Novembre 2016. On suppose que cette petite ville romaine était à son apogée au 3ème et 4ème siècle et qu'elle puisait sa force de son port commercial, qui devait être un point de contact pour les échanges maritimes avec l'ensemble de la Méditerranée.

Après des mois de travail sur le site, les archéologues viennent de révéler qu'ils ont identifié une salle de culte et son antichambre. Ils feraient parti d'un sanctuaire religieux dédié au dieu Indo-iranien Mithra. "C'est une découverte rarissime et passionnante. C'est la première fois que nous trouvons des preuves que le mithraïsme était pratiqué en Corse. Il n'y a qu'une dizaine de sites similaires connus dans toute la France, dont le dernier a été découvert près de la ville d'Angers en 2010" rapporte Chapon.

Le culte de Mithra était présent en Corse
 Un morceau de la structure en marbre dépeignant la scène mythologique. Photo:   © Denis Gliksman, Inrap

Lui et ses collègues ont mis au jour un certain nombre de reliques comprenant trois lampes à huile, et trois pièces brisées d'une structure en marbre dépeignant une scène mythologique de la religion: le sacrifice d'un taureau par Mithra. Sur l'une de ces pièces, les archéologues ont pu distinguer un chien et un serpent buvant le sang du taureau, tandis qu'un scorpion pince ses testicules.

D'autres artéfacts comprennent une tête de femme en marbre, des cloches en bronze et des poteries.


Des tensions avec le christianisme


Le mithraïsme fut probablement introduit en occident à peu près au même moment que le christianisme, et a fini par rivaliser avec elle concernant les adeptes. On sait que le mithraïsme fut apporté dans l'Empire Romain par les marchands venant de l'Orient et les soldats romains.

On sait très peu de choses sur cette religion monothéiste primitive, car il n'y a pas de sources écrites qui la décrivent. La plus grande partie des connaissances que les archéologues ont rassemblé avec les années provient de l'examen des sanctuaires dédiés à Mithra, des représentations des rituels sur les murs et des reliques laissées par les adorateurs.

 Clochette en bronze utilisée pour le culte de Mithra. Photo: © Denis Gliksman, Inrap

   Lampe à huiler destinée à l’éclairage du mithraeum, découverte dans les niches voûtés. Photo  © Denis Gliksman, Inrap

Cette religion n'était probablement accessible que pour les hommes, et elle a commencé à se répandre parmi les élites avant de toucher toutes les couches sociales.

L'empereur romain Théodose 1er, qui proclama le christianisme comme religion officielle de l'Empire en 392, combattit le mithraïsme et en interdit sa pratique.

Certains des artéfacts découverts dans le sanctuaire corse portent des traces de dommage faites dans l'Antiquité. L'autel, par exemple, a été brisé. Bien que l'on ne sache pas exactement ce qui a causé la destruction, les archéologues font remarquer qu'une grande structure chrétienne a été construite à Mariana aux alentours de 400. C'est l'une des plus anciennes traces de christianisme sur l'île et cela suggère qu'il a pu y avoir des tensions entre les deux religions.

Vous découvrirez davantage de photos sur le site de l'INRAP.

Merci à Mr Morellet et Audric pour l'Info !


Sources:

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2.22.2017

La plus longue épée de l'ancien Japon découverte dans une tombe du 6ème siècle

Des découvertes qui changeront les manuels d'histoire ont été faites après que des artéfacts d'une ancienne tombe du 6ème siècle dans le district de Shimauchi, dans l'île de Kyūshū, aient été examinés.

Les experts ont confirmé en octobre 2016 que deux épées trouvées dans la tombe à couloir, N°139, d'un site funéraire fouillé entre 2014 et 2015, sont des découvertes historiques.

L'une est la plus longue épée jamais mise au jour dans une ancienne tombe au Japon, tandis que la poignée de l'autre est recouverte d'une peau de raie.

La plus longue épée de l'ancien Japon découverte dans une tombe du 6ème siècle
Décoration sur la poignée d'une épée découverte dans un ancien tombeau à Ebino, dans la préfecture de Miyazaki; il s'agit du plus ancien artisanat en peau de raie découvert en Asie de l'est (Provided by Ebino city government)

Les épées avaient été placées près de restes humains dans la tombe N°139, et les deux portent les signes d'un statut social élevé. "Les épées suggèrent qu'il y avait un puissant individu dans le sud de Kyūshū, qui devait directement servir une personne de haut rang dans l'entourage du roi Yamato, et qui serait allé à l'étranger en charge de la politique étrangère", explique Tatsuya Hashimoto, professeur associé d'archéologie au musée de l'université de Kagoshima, et collaborateur de la recherche.

L'ancien royaume de Yamato a gouverné la plus grande partie de l'archipel japonais au cours la période Kofun (du 3ème au 7ème siècle). La tombe à couloir N°139 est dans un style unique aux préfectures Miyazaki et Kagoshima et à la période Kofun.

De nombreux accessoires funéraires précieux tels que des armures, des armes, et des harnais pour chevaux ont été mis au jour en plus des deux épées, en 2014 et 2015.

L'Institut Gangojipour pour la recherche de biens culturels, à Nara, a mené les travaux de conservation ainsi que les analyses scientifiques.

La plus longue épée de l'ancien Japon découverte dans une tombe du 6ème siècle
Une épée et un fourreau découverts à Ebino, préfecture de Miyazaki; elle devait faire près de 150cm de long (Shunsuke Nakamura)

Le travail de nettoyage a révélé environ 142cm de l'épée avec un pommeau en bois encore en place. Selon les chercheurs, si elle était reconstruite elle devrait faire environ 150cm dans son état d'origine, ce qui en fait la plus longue épée découverte jusqu'ici dans un ancien tombeau au Japon.

Au sommet de celle-ci, un textile précieux appelé "tatenishiki" ou un brocard en chaîne, était utilisé pour recouvrir le tour de l'ouverture du fourreau. Il n'y a que quatre exemplaires d'un tel textile luxueux de la même période qui ont découvert jusqu'ici au Japon. Cette épée est considérée comme étant un cadeau du royaume Yamato.

Une autre analyse a montré que l'une des épées plus longues enterrée dans la tombe, faisant environ 85cm avec un pommeau rond en argent décoré, avait sa poignée recouverte d'une peau granulaire de raie. Il s'agit du plus ancien artisanat en peau de raie découvert dans l'est de l'Asie. On suppose que l'épée a été faite dans l'ancien royaume Paekche dans la péninsule coréenne.


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2.16.2017

Des centaines de géoglyphes sous la forêt amazonienne

La forêt tropicale amazonienne a été transformée il y a plus de deux mille ans par les anciennes populations qui ont construit des centaines de grands et mystérieux ouvrages en terre.

Découverts par des experts brésiliens et anglais, ils apportent de nouveaux éléments sur la façon dont les peuples indigènes vivaient an Amazonie avant l'arrivée des européens dans la région.

Des centaines de géoglyphes sous la forêt amazonienne
Credit: Jenny Watling

Les enceintes abandonnées, dans l'état d'Acre dans l'ouest brésilien de l'Amazonie, étaient masquées depuis des siècles par les arbres. C'est la déforestation moderne qui a permis de découvrir plus de 450 de ces grands géoglyphes géométriques.

La fonction de ces mystérieux sites reste encore très peu comprise; il y a peu de chances qu'ils aient pu être des villages car les archéologues n'ont découvert que très peu d'artéfacts lors des fouilles. De plus, leur disposition suggère qu'ils n'ont pas été construits à des fins défensives.

On pense qu'ils étaient utilisés uniquement de façon sporadique, peut-être comme lieux de rassemblement rituel.


Les structures sont des enceintes fermées qui occupent environ 13000km².


Leur découverte conteste les hypothèses selon lesquelles l'écosystème de la forêt tropicale n'a pas été perturbé par les hommes.

L'étude a été menée par Jennifer Watling, chercheuse postdoctorale au Musée d'Archéologie et d'Ethnographie de l'Université de São Paulo, alors qu'elle étudiait pour un doctorat à l'Université d'Exeter: "le fait que ces sites soient restés cachés pendant des siècles sous la forêt tropicale mature remet en question l'idée que les forêts amazoniennes sont des écosystèmes vierges. Nous avons immédiatement voulu savoir si la région était déjà boisée lorsque les géoglyphes ont été construits, et jusqu'à quel point les hommes ont pu avoir un impact sur le paysage en bâtissant les ouvrages en terre".
Des centaines de géoglyphes sous la forêt amazonienne
Credit: Jenny Watling

A l'aide de techniques de pointe, les membres de l'équipe ont pu reconstruire 6000 ans d'histoire concernant la végétation et le feu autour des sites de géoglyphes. Ils ont découvert que les hommes ont modifié fortement les forêts de bambou depuis des millénaires et qu'ils ont aménagé de petites clairières provisoires pour construire les géoglyphes.

Au lieu de brûler de grandes étendues de forêt, que ce soit pour la construction de géoglyphes ou pour les pratiques agricoles, ils ont transformé leur environnement en se concentrant sur des arbres économiquement utile, comme le palmier, créant une sorte de "supermarché préhistorique" des produits forestiers utiles.


L'équipe a aussi trouvé des indices laissant penser que la biodiversité de certaines forêts de l'Acre pourrait avoir un important héritage de ces anciennes pratiques d'agroforesterie.


D'après le Dr Watling, "malgré le grand nombre et la densité des sites de géoglyphes dans la région, nous sommes certains que les forêts de l'Acre n'ont jamais été défrichées de façon aussi extensive qu'elles ne l'ont été ces dernières années. Notre preuve que les forêts amazoniennes ont été gérées par des peuples autochtones bien avant l'arrivée des européens ne doit pas servir de justification pour l'utilisation destructrice et non durable du sol pratiqué aujourd'hui. Cela devrait plutôt servir à mettre en évidence l'ingéniosité des anciens régimes de subsistance qui n'ont pas conduit à la dégradation des forêts, et l'importance de la connaissance des peuples indigènes pour trouver des alternatives plus durables pour l'utilisation des terres".

L'étude a impliqué des chercheurs des universités d'Exeter, Reading et Swansea, São Paulo, Belémet Acre. La recherche a été financée par l'Arts and Humanities Research Council, le National Geographic et le NERC Radiocarbon Facility.

Pour mener à bien l'étude, l'équipe a extrait des échantillons de sol d'une série de fosses creusées à l'intérieur et à l'extérieur des géoglyphes. A partir de ces échantillons, ils ont analysé les phytolithes (des microfossiles micrométriques de cellules végétales) afin de reconstruire l'ancienne végétation; des charbons pour évaluer la quantité de forêt ancienne brûlée et des isotopes stables de carbone pour connaitre l'ouverture de la végétation dans le passé.

Relecture par Digitarium.fr
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