9.30.2019

Un archéologue apporte des réponses sur les bâtisseurs de Stonehenge

Grâce à une technique de pointe inventée et dirigée par l’universitaire belge Christophe Snoeck, nous en savons maintenant un peu plus sur les mystères de Stonehenge.

Ses analyses suggèrent qu’un certain nombre de personnes qui ont été enterrées sur le site de Wessex ont déplacé et probablement transporté les pierres bleues, utilisées au début de la construction du monument, et provenant des montagnes Preseli dans l’ouest du Pays de Galles.

Fouilles du trou d'Aubrey N°7 à Stonehenge. Photo: Adam Stanford

Bien qu’on ait beaucoup spéculé sur la manière et la raison pour lesquelles l'ensemble de pierres mythique a été construit, la question de savoir qui l’a bâti a suscité jusqu'ici beaucoup moins d’attention. C'est là qu'intervient le Dr Snoeck, de la Vrije Universiteit Brussel (VUB).


Ses recherches novatrices ont enfin permis d'extraire des informations sur l'origine géographique des personnes incinérées.


En partenariat avec des collègues du Musée National d'Histoire Naturelle de Paris et de la University College de Londres, il a dirigé la recherche sur Stonehenge qui combinait des datations radiocarbone  et de nouveaux développements dans l'analyse archéologique.

Le Dr Snoek, qui a inventé la technique au cours de sa recherche doctorale, a découvert que certaines informations biologiques survivent aux hautes températures atteintes lors de la crémation (jusqu'à 1000°C). Du coup, cela donne la "possibilité passionnante"de pouvoir enfin étudier l'origine de ceux qui ont été enterrés à Stonehenge.

Le Dr Snoek

Il a expliqué comment son équipe a réalisé le travail et l’importance de leurs découvertes: "Stonehenge est l'un des sites archéologiques les plus emblématiques au monde, et lorsque j'ai eu l'opportunité de mener une étude sur le site, cela a été un immense privilège. Avant de commencer notre recherche, nous savions, d'après de précédents travaux, que les pierres bleues utilisées pour construire les anciennes phases du monument provenaient de l'ouest du Pays de Galles. En travaillant directement sur les restes humains découverts sur le site, nous espérions avoir un aperçu, non pas sur l'origine des pierres, mais sur l'origine de ceux qui utilisaient le site et y étaient enterrés."

Les travaux ont impliqué l'analyse de petits fragments d'ossements humains incinérés lors d'une ancienne phase de l'histoire du site aux alentours de 3000 avant JC, lorsqu'il était utilisé essentiellement comme cimetière.

"La plupart des recherches sur Stonehenge se sont concentrées sur les pierres" explique-t-il, "on sait peu de choses  concernant les humains enterrés sur le site. Cela est principalement du au fait qu'ils ont été incinérés et que seuls restaient des fragments d'ossements. Ce n'est que très récemment que de nouvelles méthodes ont été développées pour étudier les restes humains incinérés".

Au cours de son doctorat, il a mis au point une méthode permettant d'extraire des informations sur l'origine géographique des personnes incinérées.  Cette méthode dit-il "a été appliquée à 25 individus incinérés à Stonehenge et nos résultats montrent que 40% n'avaient pas vécu près de Stonehenge dans la dernière décennie avant leur mort, mais ils venaient de plus loin. Certains étaient peut-être originaires de l'ouest du pays de Galles, d'où proviennent les pierres bleues, à environ 250 km. Cela montre l’importance du site dans le paysage britannique au néolithique."

Sa contribution personnelle à l’étude a principalement porté sur les analyses scientifiques, notamment les analyses isotopiques, élémentaires et infrarouges. Les résultats ont ensuite été discutés et interprétés avec le reste de l'équipe.

Fragments d'os occipital incinérés de Stonehenge.

Toutefois, il ne faut pas négliger les problèmes liés à la manipulation de minuscules fragments d'os brûlés: "Travailler sur des fragments d'os incinérés peut être très délicat, car ils sont très petits et cassants. Cependant, avec les soins appropriés, nous avons pu effectuer toutes les analyses prévues".


Comprendre la passé.


Selon le Dr Snoeck, les résultats soulignent l’importance des liens interrégionaux impliquant le mouvement des matériaux et des personnes dans la construction et l’utilisation de Stonehenge. Celui-ci, à son tour, fournit un aperçu rare de la vaste gamme de contacts et d’échanges au néolithique, il y a déjà 5000 ans.

Le Dr Snoeck, qui est spécialisé en archéologie et en chimie, dit qu'il est important de comprendre les vies passées des populations animales et humaines, ce qui inclue leur régime alimentaire, leur mobilité, leur utilisation du paysage et les conditions environnementales.

Les techniques utilisées sur le projet Stonehenge peuvent être utilisées, espère-t-il, pour améliorer notre compréhension du passé: "comprend notre passé est, pour moi, d'une importance cruciale pour mieux comprendre où nous en sommes maintenant et comment nous avons atteint ce stade. Je pense que Stonehenge ainsi que les pyramides d'Egypte (et beaucoup d'autres sites) sont fascinants. Ce sont des marqueurs de notre passé et résoudre les mystères de leur construction et de leur utilisation nous aide certainement à mieux comprendre notre passé."

Sur l'importance d'en apprendre davantage sur les populations de la période néolithique, il dit qu'en rassemblant plus d'informations sur elles, on peut commencer à comprendre l'emplacement de tels sites dans le paysage et comment ils ont façonné les sociétés et les croyances à travers le temps et l'espace.

"Nous étions fascinés de constater que tous les individus ne vivaient pas à proximité du site et que beaucoup d’entre eux s’étaient déplacés sur de très grandes distances pour se rendre à Stonehenge. Comprendre comment les personnes et les sociétés ont changé dans le temps et dans l'espace nous aide à comprendre les sociétés actuelles et comment elles pourraient changer et interagir," dit-il.

À la suite de cette étude novatrice, il a été nommé parmi l'un des trois candidats au prix de l'archéologue de l'année 2019 par le magazine britannique Current Archaeology.

Christophe Snoeck envisage également d'étudier des restes incinérés dans d'autres pays: "Ils ont été un peu oubliés et mis de côté. Et j'ai trouvé cela très triste, car dans de très grandes parties du monde, notamment dans la préhistoire européenne, des personnes ont été incinérées."


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