Les énigmatiques alignements de pierres de la région de Carnac, en Bretagne, comptent parmi les monuments mégalithiques les plus célèbres d'Europe, aux côtés de Stonehenge, Menga et des temples mégalithiques de Malte.
Pour la première fois, il a été possible de dater des parties de ces alignements avec une plus grande précision et d'obtenir de nouvelles informations sur leur fonction.
Cette avancée est le fruit d'une collaboration franco-suédoise dans le cadre du projet de recherche NEOSEA, mené par l'Université de Göteborg en partenariat avec la société de fouilles française Archeodunum et l'Université de Nantes.
"Les alignements de la région de Carnac semblent aujourd'hui figurer parmi les plus anciens monuments mégalithiques d'Europe, cette section ayant été construite entre 4600 et 4300 avant J.-C. Nous avons également confirmé que le Golfe du Morbihan est la plus ancienne région mégalithique d'Europe", a déclaré l'archéologue Bettina Schulz Paulsson de l'Université de Göteborg, qui dirige le projet NEOSEA et est l'une des chercheuses à l'origine de la nouvelle étude publiée dans Antiquity.
Plus de 3 000 menhirs s'étendent sur 10 km dans la région, de Carnac/La Trinité-sur-Mer à Erdeven, formant une concentration unique d'alignements mégalithiques dans un paysage côtier.
Les archéologues ont fouillé une zone jusqu'alors inconnue, Le Plasker, en bordure de Carnac. Ils ont ainsi pu réaliser des analyses poussées du matériel, notamment des datations au radiocarbone, des analyses statistiques de grandes séries de datations au radiocarbone, ainsi que des analyses de sédiments et de charbons de bois.
La fouille préventive du Plasker, situé au cœur de Plouharnel, a été menée par l'entreprise de fouilles Archeodunum, sous la direction d'Audrey Blanchard, directrice des fouilles et chercheuse au sein du projet NEOSEA à l'Université de Göteborg, en amont du développement d'un parc d'activités de 7 000 m². Des techniques de fouille modernes et performantes, combinées à un échantillonnage systématique, ont révélé de nombreuses caractéristiques archéologiques."Grâce à près de 50 datations au radiocarbone et à l'application de la modélisation statistique bayésienne, nous avons pu reconstituer l'histoire du site avec une précision chronologique sans précédent", explique Bettina Schulz Paulsson de l'Université de Götebor.
Une modélisation bayésienne*
En raison de l'acidité des sols du Morbihan, la matière organique, notamment osseuse, subsiste rarement, ce qui a longtemps limité les possibilités de datation au radiocarbone dans la région. De plus, il est souvent impossible de confirmer un lien entre les échantillons de charbon de bois datés et l'érection des menhirs, et d'autres méthodes, comme la datation OSL (luminescence optiquement stimulée), donnent souvent des résultats trop imprécis pour permettre des conclusions claires.
"Cependant, grâce à un ensemble de données suffisamment important et à la modélisation bayésienne, ce défi a été relevé", pour Schulz Paulsson.
Plusieurs alignements de menhirs ont été datés entre 4 600 et 4 300 avant J.-C. Si les pierres elles-mêmes ont été retirées, que ce soit à l'époque historique ou préhistorique, leurs fosses de fondation subsistent. Ces fosses étaient alignées le long de foyers ou de fosses de cuisson, ce qui suggère que les alignements de pierres pourraient avoir été construits en lien avec des éléments liés au feu. On ignore si ces foyers servaient à l'éclairage, à la cuisine ou aux festins lors de l'érection des pierres. Des analyses plus poussées des sédiments et des fragments de pierre sont en cours.
Le site a également révélé une tombe monumentale, construite vers 4700 av. J.-C., directement au-dessus des vestiges d'une hutte de chasseurs-cueilleurs mésolithiques.
Lien vers l'étude:
- Antiquity: "Le Plasker in Plouharnel (fifth millennium cal BC): a newly discovered section of the megalithic complex of Carnac"
*La modélisation bayésienne:
La modélisation bayésienne est une approche statistique qui utilise le théorème de Bayes pour mettre à jour les probabilités des hypothèses à mesure que de nouvelles données sont disponibles. Elle consiste à construire des modèles probabilistes en intégrant des connaissances a priori (appelées priors) avec des données observées pour obtenir une distribution a posteriori des paramètres inconnus.
1 commentaire:
Le terme « Bayesien » a été employé à plusieurs reprise dans cet article. Pour l’intelligibilité et la crédibilité de celui-ci il serait bon d’expliciter la « statistique Bayesienne »
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