1.29.2025

Découverte d'un système unique de drainage et d'irrigation qui a donné lieu à la « révolution néolithique » en Amazonie

Une société précolombienne de l'Amazonie a développé un système d'ingénierie agricole sophistiqué qui lui a permis de produire du maïs tout au long de l'année, selon une découverte réalisée par une équipe de chercheurs de l'Institut des sciences et technologies de l'environnement (ICTA-UAB) et du Département de préhistoire de l'Université autonome de Barcelone (Espagne), des universités d'Exeter, Nottingham, Oxford, Reading et Southampton (Royaume-Uni), de l'Université de São Paulo (Brésil) et de collaborateurs boliviens.

Cette découverte contredit les théories précédentes qui rejetaient la possibilité d'une agriculture intensive en monoculture dans la région.

L'étude, publiée dans la revue Nature, décrit comment la société préhispanique Casarabe des Llanos de Moxos en Bolivie a conçu et mis en œuvre un système d'ingénierie paysagère innovant, comprenant la construction de vastes canaux de drainage et d'étangs agricoles.

Découverte d'un système unique de drainage et d'irrigation qui a donné lieu à la « révolution néolithique » en Amazonie 
Étangs dans la zone étudiée. Crédit : Umberto Lombardo ICTA-UAB

Cette avancée a permis la transformation des savanes tropicales inondées en champs hautement productifs, favorisant ainsi le développement de la « révolution néolithique » en Amazonie, comprise comme le processus vers une économie basée sur la production de céréales.

Cette région, habitée par le peuple Casarabe entre 500 et 1400 après J.C., est une savane tropicale de basse altitude caractérisée par des saisons de pluies intenses et d'inondations, ainsi que par des saisons très sèches. L'exploration, menée par Umberto Lombardo, archéologue environnemental de l'UAB, a permis d'identifier une infrastructure agricole unique jusqu'alors inédite dans le monde.

Ce système leur permettait de drainer l'excès d'eau des champs inondés pendant la saison des pluies, facilitant ainsi la productivité agricole. En plus des canaux de drainage, les Casarabe construisaient des groupes d'étangs agricoles qui servaient de réservoirs d'eau. Ces étangs permettaient l'irrigation par pots, ce qui permettait de poursuivre la culture du maïs tout au long de la saison sèche.

Ce système de gestion de l’eau à double échelle permettait de récolter au moins deux fois par an du maïs, ce qui garantissait un approvisionnement alimentaire stable tout au long de l’année, ce qui était essentiel pour nourrir une population relativement nombreuse. 

"Cette stratégie agricole intensive indique que le maïs n’était pas seulement cultivé, mais qu’il était probablement la culture de base de la culture Casarabe", explique Lombardo.

Ce modèle agricole ne reposait pas sur les techniques traditionnelles de brûlis utilisées pour créer des champs fertiles. Au lieu de cela, les Casarabe préservaient les forêts voisines à d’autres fins, comme l’obtention de bois de chauffage et de plantes médicinales, tout en mettant en œuvre des pratiques qui maximisaient l’utilisation efficace de l’eau et du sol dans les savanes inondées de façon saisonnière.

Ces conclusions ont été rendues possibles grâce à un travail de terrain méticuleux combinant des techniques telles que l’analyse microbotanique, la télédétection et l’archéologie environnementale.

L’analyse de 178 échantillons de phytolithes (microfossiles végétaux) et de pollen provenant d’un étang de ferme a confirmé la présence de maïs dans les champs et le rôle crucial de la monoculture du maïs dans l’alimentation de cette société précolombienne. "Les données montrent l’absence d’autres types de cultures", ajoute Lombardo.

 
Illustration des étangs décrits dans l'article. Crédit : Julian Puig Guevara

"Nous pouvons prouver qu'il s'agit de la première économie agraire basée sur les céréales en Amazonie, où jusqu'à présent on pensait que l'agriculture était basée sur la polyculture agroforestière et non sur des monocultures à grande échelle. Nous savons maintenant que ce n'était pas le cas à Llanos de Moxos", explique Lombardo, qui affirme que cette innovation technique a permis de transformer un environnement difficile en un système productif qui a assuré la stabilité alimentaire et soutenu le développement d'une population croissante.

La recherche met non seulement en lumière les capacités technologiques des civilisations précolombiennes, mais offre également de précieuses leçons pour la durabilité agricole moderne.

Cette découverte témoigne de l'ingéniosité et de l'adaptabilité du peuple Casarabe, qui a prospéré grâce à sa capacité à concevoir des solutions agricoles durables à long terme dans un environnement défavorable.

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